La femme selon l'Évangile
(L.A.B rédaction
L'idée reçue première relative à la religion et donc, par rebond, à la Foi est que celle-ci est misogyne. En effet, les religions établies n'ont jamais fait grand cas des femmes en général: celles-ci sont réduites au rôle de génitrices, parfois à celui, légèrement supérieur, de mères, presque souvent celui d'esclaves des hommes. Mais la religion n'est pas la Foi; la religion est la forme que les hommes donnent à la relation qu'ils veulent avoir avec Dieu. Ainsi, ils prétextent de textes pour organiser leurs relations sociales et il leur est donc facile de justifier ainsi le machisme facile qui transpire dans les religions chrétiennes.
Cela n'a rien à voir avec ce qui est dit dans les textes, cela n'a rien à voir avec l'esprit des Evangiles que nous allons essayer, en quelques lignes, de préciser ici.
Nous commencerons par les mots de Jésus lui-même:
Évangile selon St Luc 10:38 Comme Jésus était en chemin avec ses disciples, il entra dans un village, et une femme, nommée Marthe, le reçut dans sa maison. 39 Elle avait une soeur, nommée Marie, qui, s'étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole. 40 Marthe, occupée à divers soins domestiques, survint et dit: Seigneur, cela ne te fait-il rien que ma soeur me laisse seule pour servir? Dis-lui donc de m'aider. 41 Le Seigneur lui répondit: Marthe, Marthe, tu t'inquiètes et tu t'agites pour beaucoup de choses. 42 Une seule chose est nécessaire. Marie a choisi la bonne part, qui ne lui sera point ôtée.
Jésus dit de cette femme qu'elle a choisi la bonne part... Qu'est-ce que cela veut dire?. Cette Marie est connue par ailleurs:
Evangile selon St-Mathieu 26:6 Comme Jésus était à Béthanie, dans la maison de Simon le lépreux, 7 une femme s'approcha de lui, tenant un vase d'albâtre, qui renfermait un parfum de grand prix; et, pendant qu'il était à table, elle répandit le parfum sur sa tête.
Evangile selon St-Jean 11:1 Il y avait un homme malade, Lazare, de Béthanie, village de Marie et de Marthe, sa soeur. 2 C'était cette Marie qui oignit de parfum le Seigneur et qui lui essuya les pieds avec ses cheveux, et c'était son frère Lazare qui était malade. 3 Les soeurs envoyèrent dire à Jésus: Seigneur, voici, celui que tu aimes est malade.
Il est aussi fait mention d'elle dans l'Evangile selon St Marc (14:3), St-Jean, (12:3) et St- Luc (7:37) ou elle est appelée "femme pécheresse" .
On s’est souvent servi du premier texte pour faire valoir que la « bonne part » du croyant était de laisser les tâches matérielles au second rang. Ce n’est pas faux, mais ce n’est pas la « bonne part » que cette Marie a choisi.
Marie, qui était une femme du commun, « pécheresse » nous dit-on, donc probablement prostituée a choisi de s’asseoir avec les hommes ! C’est là sa « bonne part ». En effet, on voit au moment de la mort de Lazare qu’elle a moins bien compris que sa sœur, donc ce n’est pas son attitude réceptive que Jésus met en avant, il loue son choix de ne pas avoir un rang inférieur parce qu’elle est femme. Plus tard Paul évoque cette notion inhérente à l’Évangile, celle de l’égalité dans tous les êtres :
Epitre de St-paul aux Galates 3:28 Il n'y a plus ni Juif ni Grec, il n'y a plus ni esclave ni libre, il n'y a plus ni homme ni femme; car tous vous êtes un en Jésus-Christ.
L’évangile libère chacun de sa condition sociale et rend chacun égal à l’autre. Toutefois, cette liberté a posé quelques problèmes aux chrétiens de l’époque, car si eux avaient changé, leur entourage non.
La liberté que les chrétiens affichaient dans leurs rassemblements leur portait préjudice, car ceux qui les regardaient, de l’extérieur, y voyaient la plus grande licence. Ainsi, St-Paul va-t-il recommander une attitude plus circonspecte qui évitera que les rassemblements de chrétiens soient pris pour des moments de débauche :
1ère épitre de St-Paul à Thimothée 2 : 9 Je veux aussi que les femmes, vêtues d'une manière décente, avec pudeur et modestie, ne se parent ni de tresses, ni d'or, ni de perles, ni d'habits somptueux, 10 mais qu'elles se parent de bonnes oeuvres, comme il convient à des femmes qui font profession de servir Dieu. 11 Que la femme écoute l'instruction en silence, avec une entière soumission. 12 Je ne permets pas à la femme d'enseigner, ni de prendre de l'autorité sur l'homme; mais elle doit demeurer dans le silence.
On a utilisé ces propos de St-Paul, qui était célibataire, pour réduire la place des femmes ; c’est abuser du texte qui n’est pas là pour que les femmes se soumettent sans parole, mais juste parce qu’une trop grande liberté en fonction des mœurs du pays et du moment sont préjudiciables à la réputation de l’assemblée et de la à la Foi. On trouvera ailleurs d’autres recommandations sur port du voile, elles sont relatives à des significations culturelles précises et St-Paul, heureusement, fait appel au bon sens des chrétiens pour définir le comportement et l’attitude vestimentaire des croyants :
1ère Epitre de St-Paul aux Corinthiens 11 : 13 Jugez-en vous-mêmes: est-il convenable qu'une femme prie Dieu sans être voilée? 14 La nature elle-même ne vous enseigne-t-elle pas que c'est une honte pour l'homme de porter de longs cheveux, 15 mais que c'est une gloire pour la femme d'en porter, parce que la chevelure lui a été donnée comme voile?
Ce « jugez-en vous mêmes » montre bien qu’il est question de faire appel au sens commun des croyants assemblés. C’est ce qui nous paraît naturel qui doit être mis en pratique, car le croyant n’est pas hors de son monde, mais il est de son lieu et se temps.
Il y a un autre élément qui permet de définir la position de la femme dans l’Evangile, c’est que l’image de la relation homme/femme dans un couple est l’image de la relation Dieu avec l’ensemble des croyants.
Les textes bibliques mettent un accent important sur la constance du mariage, la fidélité des époux ; un livre entier, même, est dédié à l’amour entre un homme et une femme (le Cantique des Cantiques):
Livre de la Genèse 2:24 C'est pourquoi l'homme quittera son père et sa mère, et s'attachera à sa femme, et ils deviendront une seule chair.
Épître aux Hebreux 13:4 Que le mariage soit honoré de tous, et le lit conjugal exempt de souillure, car Dieu jugera les impudiques et les adultères.
1ère Épître de St-Paul aux Corinthiens 7:3 Que le mari rende à sa femme ce qu'il lui doit, et que la femme agisse de même envers son mari.
Épître de St-Paul aux Éphésiens 5:25 Maris, aimez vos femmes, comme Christ a aimé l'Église, et s'est livré lui-même pour elle,
Et pourtant, la personne à laquelle il nous est demandé de vouer un amour qui n’a même pas notre propre vie pour limite, ne sera rien pour nous dans l’au-delà...
Évangile selon St-Luc 20 : 27 Quelques-uns des sadducéens, qui disent qu'il n'y a point de résurrection, s'approchèrent, et posèrent à Jésus cette question: 28 Maître, voici ce que Moïse nous a prescrit: Si le frère de quelqu'un meurt, ayant une femme sans avoir d'enfants, son frère épousera la femme, et suscitera une postérité à son frère.29 Or, il y avait sept frères. Le premier se maria, et mourut sans enfants. 30 Le second et le troisième épousèrent la veuve; 31 il en fut de même des sept, qui moururent sans laisser d'enfants. 32 Enfin, la femme mourut aussi. 33 A la résurrection, duquel d'entre eux sera-t-elle donc la femme? Car les sept l'ont eue pour femme. 34 Jésus leur répondit: Les enfants de ce siècle prennent des femmes et des maris; 35 mais ceux qui seront trouvés dignes d'avoir part au siècle à venir et à la résurrection des morts ne prendront ni femmes ni maris. 36 Car ils ne pourront plus mourir, parce qu'ils seront semblables aux anges, et qu'ils seront fils de Dieu, étant fils de la résurrection.
Jésus dit clairement que nos rapports affectifs ne continueront plus dans le paradis. Pourtant, l’Église est symbolisée par une fiancée, ou une épouse. Dans l’apocalypse, l’ensemble des croyants sauvés est un seul corps qui épouse « l’Agneau de Dieu »
Épître de St-Paul aux Ephésiens 5:25 Maris, aimez vos femmes, comme Christ a aimé l'Église, et s'est livré lui-même pour elle,
Épître de St-Paul aux Ephésiens 5:29 Car jamais personne n'a haï sa propre chair; mais il la nourrit et en prend soin, comme Christ le fait pour l'Église,
Apocalypse 21 : 7 Celui qui vaincra héritera ces choses; je serai son Dieu, et il sera mon fils. 8 Mais pour les lâches, les incrédules, les abominables, les meurtriers, les impudiques, les enchanteurs, les idolâtres, et tous les menteurs, leur part sera dans l'étang ardent de feu et de soufre, ce qui est la seconde mort. 9 Puis un des sept anges qui tenaient les sept coupes remplies des sept derniers fléaux vint, et il m'adressa la parole, en disant: Viens, je te montrerai l'épouse, la femme de l'agneau
Comment la femme désirée par son amoureux, très souvent citée comme une image symbolique de l’Église peut-elle n’être plus rien pour celui qui l’a aimée, une fois l’humanité entrée dans la dimension divine ?
C’est parce que nous en avons une vision humaine et rétrécie. La relation de don mutuel et sans réserve que doivent avoir deux époux est à l’image de la relation idéale de Dieu et des hommes : totalement fusionnelle, irréversible, permanente et fidèle éternellement. Cet amour que chacun cherche tout au long de sa vie, quitte parfois à multiplier les tentatives ou à s’efforcer de maintenir une union qui est une erreur, c’est celui que nous propose Dieu, non seulement avec lui-même, mais encore avec tous ceux qui croiront, tous ceux qui vivent dans l’attente, l’espoir et la volonté que cette « patrie » d’une nouvelle dimension soit la leur. Chaque image que je pourrais donner va limiter le propos, mais en ayant une conception aussi limitée que chacun d’entre nous, je n’ai pas d’autre solution.
Dans notre vie, on pourrait assimiler le parcours de deux êtres qui s’aiment de façon presque idéale à un accord de deux notes, accord équilibré, beau ; chaque note s’enrichissant de l’autre. Le paradis serait une gigantesque partition symphonique où toutes les notes sonneraient parfaitement ; les unes mises en valeur par les autres et réciproquement.
Ainsi, le mariage, le couple amoureux vivant en parfaite harmonie n’est qu’une image partielle de ce que Dieu nous propose avec lui dans l’au-delà. Il n’est donc pas question d’oublier ceux que nous aimons, ceux que nous avons aimé, ceux que nous aurions aimé aimer,… le paradis étant de vivre avec eux et tous une relation aussi forte, aussi fusionnelle, aussi éternelle, fidèle, irréversible que celle dont nous rêvons de vivre avec l’être idéal pour notre vie présente.
Ceci explique l’importance de la fidélité, de l’intégralité et du sérieux des relations amoureuses.
Ceci explique, aussi, notre quête « innée » de l’amour idéal, parfait, éternel, souvent maladroite, trompée ou trompeuse, déçue ou décevante. Nous nous comportons comme les héros de la foi cités dans l’épître aux hébreux (chapitre 11) , la « patrie » de laquelle nous nous réclamons n’étant ni un état politique, social ou physique, mais l’accomplissement du sentiment suprême (celui d’ailleurs du commandement de Jésus) dans une dimension dont nous n’avons aucune idée.
Évangile selon St-Jean 13:34 Je vous donne un commandement nouveau: Aimez-vous les uns les autres; comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres.
Évangile selon St-Jean 15:12 C'est ici mon commandement: Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés. 13 Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis.
Juste avant la Passion, Jésus prie ainsi :
Évangile selon St-Jean 17 : 1 Après avoir ainsi parlé, Jésus leva les yeux au ciel, et dit: Père, l'heure est venue! Glorifie ton Fils, afin que ton Fils te glorifie, 2 selon que tu lui as donné pouvoir sur toute chair, afin qu'il accorde la vie éternelle à tous ceux que tu lui as donnés. 3 Or, la vie éternelle, c'est qu'ils te connaissent, toi, le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ. […]
11 Je ne suis plus dans le monde, et ils sont dans le monde, et je vais à toi. Père saint, garde en ton nom ceux que tu m'as donnés, afin qu'ils soient un comme nous. […]
13 Et maintenant je vais à toi, et je dis ces choses dans le monde, afin qu'ils aient en eux ma joie parfaite. 14 Je leur ai donné ta parole; et le monde les a haïs, parce qu'ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde. […]
20 Ce n'est pas pour eux seulement que je prie, mais encore pour ceux qui croiront en moi par leur parole, 21 afin que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et comme je suis en toi, afin qu'eux aussi soient un en nous, pour que le monde croie que tu m'as envoyé. 22 Je leur ai donné la gloire que tu m'as donnée, afin qu'ils soient un comme nous sommes un, -23 moi en eux, et toi en moi, -afin qu'ils soient parfaitement un, et que le monde connaisse que tu m'as envoyé et que tu les as aimés comme tu m'as aimé. 24 Père, je veux que là où je suis ceux que tu m'as donnés soient aussi avec moi, afin qu'ils voient ma gloire, la gloire que tu m'as donnée, parce que tu m'as aimé avant la fondation du monde. […]
26 Je leur ai fait connaître ton nom, et je le leur ferai connaître, afin que l'amour dont tu m'as aimé soit en eux, et que je sois en eux.
Ainsi, l’Évangile répond à la question du sens de la vie et donne, par sa certitude (la Foi), à chacun la pleine possession présente d’une place dans la « patrie » qui se constitue de notre désir et de notre attente. Cette certitude permet de subir l’injustice de la vie actuelle, avec Joie.
1ère Épître de St-Pierre 1 : 3 Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus-Christ, qui, selon sa grande miséricorde, nous a régénérés, pour une espérance vivante, par la résurrection de Jésus-Christ d'entre les morts, 4 pour un héritage qui ne se peut ni corrompre, ni souiller, ni flétrir, lequel vous est réservé dans les cieux, 5 à vous qui, par la puissance de Dieu, êtes gardés par la foi pour le salut prêt à être révélé dans les derniers temps! 6 C'est là ce qui fait votre joie, quoique maintenant, puisqu'il le faut, vous soyez attristés pour un peu de temps par diverses épreuves,
La relation homme/femme ne doit donc pas, si elle veut être fidèle à ce dont elle est l’image, instituer une hiérarchie, une domination de l’un sur l’autre.
L’Évangile n’est en rien misogyne.
8 Septembre 1998